Ankrow
  • Ankrow
  • Lexique
  • LCC Cycle 1
    • Prologue
    • Chapitre 1
    • Chapitre 2
    • Chapitre 3
    • Chapitre 4
  • LTH Cycles
  • Strawberry-Tate
Picture

Prologue

   
     Neuf mondes identiques, mais divergents, formaient les branches de l’Excelsior Philosophorum appelé Arbre monde, un frêne majestueux et légendaire d’où découlaient de nombreux contes venus du passé. Cette histoire se déroule dans l'un de ces mondes : Midgarr. Abritant les humains. Une
 terre déchirée par quatre royaumes prospérait depuis de nombreux cycles, et tous ces peuples y évoluaient en développant leurs propres croyances, cultures et coutumes. Le mystère et la magie étaient aussi très présents dans leur vie, et apparaissaient sous des formes si singulières, qu'ils inspirèrent beaucoup de légendes, entraînant parfois la confusion ou le scepticisme lorsqu’elles dépassaient l’entendement. Car si beaucoup de Midgarriens croyaient aux fantômes, aux esprits de la nature et aux déités, tous ignoraient que les Métamorphosis en étaient la cause principale ; ces êtres magiques faits d’énergie leur permettaient d’accéder à la transmutation et à la métamorphose grâce à leur cœur de cristal. Ils sont les trésors de l’arbre monde.

Picture
     Cette histoire commence au cœur de Port Lady-Victoria durant un dimanche qui aurait dû être comme les autres, calme et tranquille. Pourtant, en dépit de la douceur de la pluie qui tombait ce jour-là, le malheur s'était abattu sur cette ville côtière avec autant de fracas que la foudre et avait secoué tous ses habitants pour les plonger dans une terreur profonde. 
     — Charles ! Tu filmes ça ? s'écria un journaliste qui cherchait à se protéger du crachin qui ruisselait sur son front. 
     ​Dans sa démarche balourde de grand nigaud, il écrasa les pâquerettes qui poussaient sur le gazon d'un petit jardin démuni de clôtures. Aujourd'hui était un grand jour pour lui et ses collègues, car cela faisait des années qu'ils attendaient un événement aussi grave que celui-ci pour faire décoller leur carrière. 
     — Oui mon Jackot, vas-y, tu passes à l'antenne ! approuva son collègue aux lèvres dissimulées sous une épaisse moustache. Levant le pouce en l'air, il venait de filmer plusieurs corbillards qui se rendaient à la même adresse qu'ils convoitaient. Des cavaliers appelés argonautes passèrent également sur leurs montures. Ces hommes aux allures de chevaliers étaient chargés de faire régner l'ordre et suivaient le chemin le long de la route qui longeait le bord de mer. 
     — Hé vous deux, attendez-moi ! s'écria une voix féminine.
     Rattrapant juste ses deux compères un peu trop pressés, Helyane Berleconte, une journaliste aux cheveux blonds coupés au carré, sortit un carnet de notes et se fraya un passage à travers une ruelle bondée de monde.
     — Essayez de prendre un plan sur l'océan avec la patrouille devant, les interpella-t-elle en recoiffant maladroitement ses cheveux ébouriffés par le vent.
     Elle semblait si frêle au milieu de ces intempéries. Ses jambes tremblaient sous les bourrasques. 
     — Ce temps gris va rajouter de l'émotion à notre reportage ! assura-t-elle.
Suivant ses conseils, l'homme à la moustache filma quelques secondes l'horizon brumeux au-delà des vagues d'où émergeait la ville sur des kilomètres grâce à des infrastructures en chêne solidement implantées dans le plancher océanique. Ses installations portuaires et ses écluses étaient placées de manière à ce qu'elles creusent de nombreux canaux biscornus, possédant une zone industrialo-portuaire et marchande qui formait au centre un très large noyau sur plus de trente kilomètres de quais, et se divisait en de nombreuses branches rappelant la silhouette d'un arbre. Son port était surnommé « L'entrée du monde » pour souligner à quel point cette ville était immense, et accueillait les navigateurs du monde entier. En effet, celle-ci était la capitale de Tartessos, un minuscule royaume prospérant au sud d'une péninsule dans l'océan Atlante. Un monde à la fois très différent et pourtant presque identique au nôtre, où les continents et leurs civilisations avaient évolué dans des conditions divergentes de celles que vous connaissez, jusqu'à leur Terre renommée « La Mer » à cause des océans qui recouvraient la plus grosse partie du globe. 
     — C'est dans la boîte ! aboya le cameraman caché par sa pilosité faciale, avant de se retourner vers le centre de toutes les attentions : une petite maison située au 3, rue Alexandre à Port Lady-Victoria, casée entre plusieurs pavillons de deux étages à la devanture en brique faisant face à l'océan. Et où une foule compacte s'affolait devant son perron.
     — C'est bon, mon Jackot, dit-il peu de temps après en entendant une voix claire s'adresser à lui dans son oreillette. La régie attend ton discours, nous sommes toujours en direct !
     L'homme à la casquette se racla la gorge et se plaça devant la vieille maison aux murs rougeâtres, salis par les fumées d'échappements provoqués par des voitures datant de la fin des années soixante-dix. Puis, il prit la parole en positionnant le micro à ses lèvres, alors que son collègue se penchait en avant pour le filmer avec son vieux modèle de caméra qu'un câble reliait à une petite fourgonnette en bas de la route. 
     — Bonjour, chers téléspectateurs ! Ici Jackot sur la chaîne deux de Tartessos ! Nous avons du nouveau à propos de l'affaire Sideras, le tueur en série qui sévit depuis plusieurs années. Aujourd'hui encore, ce monstre a fait de nouvelles victimes dans notre belle ville de Port Lady-Victoria, déclara-t-il d'un ton tragique.
     Il fit un instant de silence, avant de se tourner vers la porte à demi ouverte de la demeure pour poursuivre son discours.
     — Une famille encore non identifiée a été retrouvée sans vie dans leur résidence, portant à présent le nombre de victimes de ce tueur en série à vingt-huit ! Une femme, ses frères, ses tantes, la grand-mère, les cousins, le chinchilla, et même une arrière-grand-mère ! Tous ont été froidement massacrés durant la nuit de ce samedi vers trois heures du matin. Seul l'unique enfant du foyer n'a pas encore été retrouvé. Mais nos espoirs de le revoir en vie sont bien minces, car comme vous le savez à présent, faire disparaître les enfants est une des principales signatures de Sideras. Quoi qu'il en soit, le tueur court toujours. C'est pourquoi nous vous recommandons de rester extrêmement prudents, et de bien penser à fermer vos portes et vos fenêtres le soir. Nous vous donnerons plus d'informations sur cette affaire le moment venu, ne ratez pas notre prochain bulletin d'informations ! conclut le journaliste d'une voix pleine de gravité, alors que plusieurs sauveteurs se pressaient avec des brancards dans la maison pour récupérer les victimes.
Le cameraman coupa l’antenne et jeta un coup d’œil sur son collègue qui souhaitait à présent interviewer une femme qu'il avait repérée dans la foule et qui se tenait un peu à l'écart, en larmes, avec un mouchoir dégoulinant de pluie. Elle semblait avoir un certain âge, portait une vieille robe à fleurs usée et connaissait certainement les victimes. 
     — Excusez-moi, l'interpella l'homme à la casquette, fonçant sur elle sans le moindre tact. Pouvez-vous nous accorder un instant ? Vous semblez très affectée par les événements, avez-vous vu ou entendu un suspect hier soir ?
     — Je savais que cela arriverait, répondit la vieille femme en sanglots. Ils n'auraient jamais dû venir à Tartessos comme je le leur avais recommandé ! La famille entière en plus, mais à quoi pensaient-ils ?!
     La journaliste et son collègue échangèrent un regard intrigué avant de reporter à nouveau leur attention sur elle.
     — Vous le saviez… ? ajouta Jackot dans une expression décontenancée.
     — C'est à cause des secrets que porte cette famille, ajouta la vieille femme avant de renifler entre deux sanglots. Du Pandragon qu'ils avaient ramené de Camelot Castle. Ce tueur, il ne les avait pas choisis au hasard, il ne choisit jamais au hasard… mais si je vous en parlais, vous n'y croiriez jamais, jamais, jamais.
     — Vraiment… ? Nous vous croyons, assura le journaliste. S'il vous plaît, si vous avez un élément qui pourrait faire avancer l'enquête… 
     La vieille dame eut l'air hésitante, avant de finalement sortir de sa poche un curieux carnet à la couleur noire comme les corbeaux pour le leur montrer.
     — Il y a quelques semaines, monsieur Chrysanthème m'avait confié ceci en me demandant de le garder caché, parce qu'il avait déjà peur qu'on vienne le lui prendre. C'est un carnet rempli des notes qu'il avait prises dans les livres de la bibliothèque privée d'Alexandrie, il a beaucoup voyagé pour le compléter. 
     L'homme à l'épaisse moustache pressentait qu'elle ne lui disait pas tout au timbre de sa voix, ainsi qu'à l'expression fuyante que le coin de ses yeux pâles prenait. Elle avait probablement dû dérober cet ouvrage. Cette vieille femme semblait d'ailleurs avoir un peu trop d'informations à leur sujet pour n'être qu'un simple témoin dans cette affaire. 
     — La famille Chrysanthème de Camelot Castle ? répéta d'une voix sourde Helyane. Non, impossible…
Cependant, son collègue attrapa délicatement le livre que la pluie commençait à tacher et observa d'un œil curieux un arbre à la silhouette de frêne embossée sur la couverture de cuir, où le mot Azoth avait été inscrit.
     — Qu'est-ce que c'est que ça ? bafouilla-t-il. Ce n’est pas cet arbre mythologique dans certains contes nordiques ?
     — Ah, je connais cette histoire, répondit le cameraman en se penchant lui aussi sur le livre. C'est un arbre qui regroupe différents mondes parallèles sur chacune de ses branches. C'est l'Excelsior philosophorum ; d'après la légende, il cacherait un joyau dans ses racines. Mes parents me racontaient souvent cette histoire quand j'étais petit. 
     — C'est pas aussi un symbole d'alchimie ? fit Helyane. J'ai aussi la sensation d'avoir déjà vu ces symboles quelque part. De plus, dans d'autres croyances antiques, il a la forme d'un joyau.
     — L'arbre infini est un symbole vieux comme le monde, affirma la vieille dame d'une voix obscure. On peut aussi l'appeler l'arbre monde, ou l'arbre de vie. Il représente la force de la vie et ses origines, la création, la destruction pour de nombreuses cultures… beaucoup ne jurent que par lui, même partout au-delà de nos contrées ! 
     ​— Oui, vous avez certainement raison, opina le journaliste en se grattant la moustache. Mais ce carnet reste une pièce à conviction, vous devriez l'apporter aux argonautes à présent.
     La vieille femme hocha positivement la tête et récupéra l'ouvrage en dévisageant les trois loustics. 
     — Prenez garde au Pandragon, susurra-t-elle dans une dernière mise en garde obscure. N'y touchez jamais, sinon...
     Soudain, deux garçons de petite taille aux tenues loufoques déboulèrent de nulle part pour l'empêcher d'en dire plus.
     — Grand-mère Caillou ! s'exclama le plus petit des deux garçons qui s'était coiffé avec un mohawk teint en violet. Tu ne devrais pas rester dehors, Tonton Caillou va s'inquiéter !
Son compère habillé d'une chemise jaune banane hocha la tête et la poussa à faire marche arrière afin de l'éloigner des deux journalistes.
     — Qu'est-ce qui t'a pris de sortir par le Hoeifröst ? Tu sais qu'on ne doit pas parler aux… aux organismes vivants. Enfin tu vois, ces machins pluricellulaires.
     La vieille dame fit une longue grimace fatiguée avant de les suivre en marmonnant des paroles décousues à propos des Chrysanthème. 
     — On a un problème avec Petit frère Caillou, lança ensuite l'étrange homme au mohawk. Il a été décaillouté. Il faut qu'on aille le voir tout de suite. 
     Les trois collègues observèrent les curieux individus disparaître derrière un vieux garage, tout en se demandant de quelle planète ils débarquaient. Puis jetèrent un regard sur les sauveteurs qui évacuaient les corps vers une ambulance. Un drap blanc avait été posé sur chaque victime afin de les cacher au public qui observait tout autour. 
     — Quelle étrange affaire, marmonna le journaliste à la casquette. La famille Chrysanthème ici, à Tartessos ? Quitter leurs responsabilités à Camelot Castle pour se cacher à Port Lady-Victoria ? Des recherches sur un arbre celtique ? Je n'y crois pas, et puis ces gens ont l'air trop bizarres. 
     — Si cette histoire est vraie, on devrait penser à nos carrières, demander des informations aux inspecteurs et tenter de filmer dans la maison, dit alors son collègue qui portait toujours sa vieille caméra sur une épaule, persuadé que son idée était géniale. Sa moustache en frémissait d'impatience.
     — Il y a sûrement des clichés intéressants à prendre de la scène de crime.
     Ses deux collègues échangèrent un regard, mais la jeune femme hocha la tête tout en sortant un appareil photo Polaroid de son sac à dos, faisant danser ses boucles d'oreilles dans son geste sournois.
     ​— On va essayer de prendre autant de renseignements que possible, dit Helyane. Les téléspectateurs comptent sur nous, nous ne pouvons pas laisser passer cette information croustillante. ​
Picture
     Sans gêne, le trio se glissa par la porte après avoir négocié leur visite avec les argonautes, présentant leur pass de journaliste, et revêtit ensuite une combinaison d'enquêteur scientifique afin de ne pas perturber la scène de crime. Un des inspecteurs les guida dans un grand salon en lambris et leur indiqua les zones où ils ne devaient pas marcher entre plusieurs meubles en bois précieux, une lampe sur trépied, et un siège sculpté avec deux accoudoirs en forme de dragons. Le lieu était simple et chaleureux, délicatement parfumé avec de l’encens boisé, quelques aquarelles aux thèmes marins décoraient les murs, et un grand vase fleuri se trouvait dans l'entrée près d'un canapé truculent.
     La journaliste observa attentivement chaque meuble de la pièce, puis reporta son attention sur le plafond que l'on pouvait entendre craquer sous le poids d'un groupe de personnes qui se déplaçait juste au-dessus de leur tête.
     — Il y a eu des crimes à l'étage ? demanda-t-elle à son collègue à la casquette qui marchait à côté d'elle.
     — Oui je suppose, admit son collègue alors qu'ils faisaient le tour de la salle. Ils doivent sûrement y chercher des indices, ou l'enfant disparu.
     La jeune femme hocha la tête d'un air entendu, avant de remarquer une curieuse ombre au fond de la pièce, entre la porte de la cuisine et un placard. Mais celle-ci disparut aussi vite qu'elle était apparue, lui donnant un frisson d'angoisse tout en se sentant observée.
     — C'est plutôt cosy ici, s'exclama l'homme à la moustache. Ils n'auront pas trop de mal à vendre cette piaule malgré cette affaire.
     — Ce n’est pas sûr, répondit la journaliste en prenant quelques photos là où l'ombre se trouvait peu de temps avant. Tartessos a été traumatisée par l'affaire Sideras, cette maison pourrait bien rester vide quelques années. D'autant plus si ce dangereux prédateur court encore dehors.
     — On dit que le meurtrier revient toujours sur les lieux du crime, dit le collègue. Mais moi, je connais le dicton : la foudre ne tombe jamais deux fois au même endroit. Il doit être loin à l'heure qu'il est.
     — Et si la maison était hantée par ce… ce Pandragon ? J'ai vu une ombre inquiétante, vous ne l'avez pas vue ?
     — Les fantômes, ça n’existe pas, ricana le cameraman. Et si les futurs propriétaires ont peur, ils n'auront qu'à faire brûler un peu de sauge, et leurs problèmes seront réglés !
     La journaliste, non convaincue, soupira et roula des yeux.
Pendant que le plancher se remettait à craquer de plus belle au-dessus de leurs têtes, comme si des enfants sautaient à pieds joints, le trio se tourna vers l'agent qui leur faisait la visite.
     — La famille a été retrouvée ici, dit l'argonaute en se plaçant devant des bandes jaunes et noires placées au centre de la pièce. Ils viennent des terres des alliances celtiques et ne s'étaient installés là que tout récemment. Le reste de la famille, les cousins et les tantes, venait tout juste de les rejoindre pour fêter leur crémaillère. Ils ont vraiment été très malchanceux.
     — C'est effectivement un sacré coup de malchance… admit la journaliste en prenant des notes. Connaissez-vous le nom des membres de la famille ? Une personne à l'extérieur nous a annoncé que les victimes venaient de Camelot Castle… la famille Chrysanthème. Est-ce vrai ?
     L'homme à l'uniforme chevaleresque prit un air embêté devant sa question, mais il ne pouvait nier cette information. Après avoir esquissé une moue pleine de malaise qui s'étirait le long de sa joue gauche, il hocha positivement la tête.
     — Effectivement, la famille qui vivait ici depuis peu était la famille Chrysanthème.
     Il se racla la gorge devant les regards ébahis de tous, et haussa les épaules pour reprendre la parole d'un air grave.
     — Malheureusement nous ne pouvons pas encore rendre l'information publique, car les chefs de chaque alliance celtique souhaitent d'abord se regrouper à Camelot Castle afin de discuter de la situation dans une réunion d'urgence. C'est pourquoi vous devez garder cette information secrète sous peine d'avoir de terribles ennuis avec les clans du nord.
     — Nous comprenons, dit le caméraman d'une voix désolée. Nous ne révélerons rien tant que vous ne nous donnerez pas le feu vert.
     L'homme soupira de déception, car avec de telles informations à offrir à ses téléspectateurs, sa carrière aurait pris un nouvel essor.
     — Auriez-vous d'autres informations sur les victimes ? demanda le présentateur à la casquette bleue. Pensez-vous à un crime politique ? Quelqu'un aurait-il des raisons de vouloir supprimer une des têtes qui dirige les clans du Nord ? Il s'agissait du plus jeune frère, je crois ?
     — Non, cet homme s'appelait Adam, expliqua l'argonaute en leur montrant une photo de famille accrochée au mur. Il n'était que professeur d'astronomie et de chimie. C'était l’aînée de la famille, Agathe, qui possédait une vie plus britonnique à Camelot Castle où elle avait été élue chef par son clan.
     On pouvait voir sur la photographie un jeune enfant d'environ sept ans aux cheveux noirs lui tombant sur le visage et aux yeux sombres, assis à côté d'Adam qui lui ressemblait énormément, ainsi qu'Agathe : une jeune femme aux cheveux châtain clair vêtue d'une tenue guerrière nordique, et d'une grand-mère souriante.
     — Agathe, oui, opina le cameraman. Évidemment. J'ai déjà entendu parler d'elle, bien qu'elle fût la plus discrète parmi les chefs des alliances celtiques.
     — Le plus étrange dans cette histoire, c'est que nous n'avons aucune information sur l'enfant, nous ignorons même son prénom. Ses papiers ont été vraisemblablement volés avec d'autres documents que gardait la famille. Il va être difficile de l'identifier si Sideras a tout emmené avec lui.
     — Il n'existe aucune information sur cet enfant ? souffla la journaliste d'une voix basse et surprise. C'est une histoire de fou.
     — Nous avons tenté de demander des informations sur l'enfant aux clans du Nord. Mais eux-mêmes ignorent tout de lui. C'est comme s'il n'avait jamais existé.
     — C'est effectivement intrigant, acquiesça Helyane.
     Elle contempla d'un air désolé le bambin aux yeux sombres qui posait sur la photographie, pourtant un pyjama très sobre, tout en prenant conscience de la dureté de ce crime. Il n'était qu'un enfant, et avait dû être témoin de tant d'horreurs. Un sentiment de tristesse la prit alors, elle espérait que là où il était à présent, plus aucun mal ne lui serait jamais fait.

     Toujours intriguée par les bruits qui ne cessaient de résonner à l'étage quelques minutes plus tard, la journaliste céda à la curiosité et décida de grimper l'escalier situé vers l'entrée. Elle n'avait pas prévenu ses collègues avant de s'éloigner, car elle pensait naïvement que son absence ne durerait que quelques secondes.
     Une fois arrivée en haut, celle-ci découvrit un couloir obscur et curieusement vide de chaque côté duquel étaient alignées plusieurs chambres, tandis que l'absence d'inspecteurs l'étonna beaucoup étant donné qu'elle y avait entendu de l’activité peu de temps avant. C'est non rassuré, que la jeune femme commença à se demander si son esprit ne lui avait pas joué des tours.
Elle passa rapidement devant une chaise sur laquelle une peluche de lion verte à la crinière rouge avait été posée, et continua sa marche vers une porte entr'ouverte tout au bout de l'allée d'où un filet lumineux se faufilait.
     — Il y a quelqu'un ? tenta-t-elle d'une voix incertaine en entendant un meuble grincer juste derrière.
     Supposant que des argonautes s'y trouvaient, la jeune femme décida de s'y aventurer, mais encore une fois, elle découvrit un lieu vide qui se trouvait être une chambre d'enfant avec un lit, quelques étagères et une grande armoire en bois massif posée tout au fond de la pièce. Quelques peluches de loups et de félins avaient aussi été oubliées dans un recoin du lit, alors que des carnets à dessin traînaient par terre.
     — C'est curieux, j'aurais juré avoir entendu quelqu'un, marmonna pour elle-même la journaliste en contournant un petit cheval à bascule en bois peint de blanc et d'or, et au crin violet qu'elle caressa du bout des doigts. D'un bon pas, elle se dirigea vers la fenêtre qui éclairait la chambre d'une douce lumière terne. Son regard se posa sur un carnet posé en évidence sur l'encadrement, sa couverture était noire et un arbre en décorait la couverture. Intriguée, Helyane se demanda s'il s'agissait du même livre sur l'arbre monde observé un peu plus tôt, et décida de le dérober.
     Une fois le carnet dans son sac à main, elle observa quelques instants la foule qui s'agitait encore au-dehors, ainsi que la cavalerie et les ambulances qui étaient installés devant le perron. Puis, elle reporta son regard vers l'équidé qu'elle venait de toucher et qui possédait un regard perçant. Son crin violet ressemblait curieusement au mohawk que portait un des hommes qu'elle avait croisés quelques minutes plus tôt à l'extérieur.
     ​— Je dois être fatiguée, souffla-t-elle en passant les doigts sur la tête de l'animal en bois.
     Au moment où elle voulut quitter la pièce, un nouveau grincement se fit entendre dans son dos, plus fort que le précédent. Stupéfaite, la journaliste découvrit que la porte de la vieille armoire en merisier de deux mètres s'était ouverte. Ce qu'elle vit à l'intérieur lui fit alors si peur que ses yeux se révulsèrent, ses jambes cédèrent sous son poids et elle tomba raide inconsciente dans un bruit terrible.

Chapitre 1
Picture
​© Strawberry-Tate 2019 - 2020
Histoire protégée sous copyright.
Remerciement spécial à Pathea et Lord-Skorg pour leur aide sur les corrections.
Powered by Create your own unique website with customizable templates.
  • Ankrow
  • Lexique
  • LCC Cycle 1
    • Prologue
    • Chapitre 1
    • Chapitre 2
    • Chapitre 3
    • Chapitre 4
  • LTH Cycles
  • Strawberry-Tate